Plus beaucoup

Mardi, 5° semaine du Temps Pascal (année impaire)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 14, 27-31a)

Désormais, je ne parlerai plus beaucoup avec vous, car le prince du monde va venir. C’est donc que les événements vont se précipiter. Est-ce seulement temporel ? Est-ce l’imminence de l’arrestation qui va empêcher les échanges ? Un « car » en vérité bien déroutant, qui établit ici, de fait, un lien mystérieux entre le relatif silence de Jésus et la venue du prince de ce monde. Non pas que Jésus craigne en quoi que ce soit d’être entravé à l’avenir par le promoteur du mal, ni empêché par celui qui toujours tente de barrer aux hommes le salut. Il le dit lui-même, il n’y a rien en lui qui puisse lui « donner prise ».

Dans le déroulement de l’histoire sainte et dans l’économie du salut, plutôt une concomitance mystérieuse : le moment venu, comme un nécessaire retrait de Dieu, une entrée en silence, une grande discrétion, assumée. Une impressionnante « réserve », si apparente que certains la prendront pour un abandon. Le « Tsimtsoum » de la tradition juive en un sens, assumé par Jésus lui-même, pour laisser aux hommes le jeu véritable de leur liberté, pour laisser au monde le déploiement de son ordre propre, et à celui qui en est le Prince d’accomplir son ténébreux office.

Désormais, je ne parlerai plus beaucoup avec vous, car le prince du monde va venir. La phrase n’est pas sans actualité. La voix de Jésus est de plus en plus ténue dans le brouhaha du monde et dans le vacarme médiatique. Mais « plus beaucoup » ne veut pas dire « plus du tout ». Si le mal et son prince s’emparent souvent des micros et occupent volontiers le devant de la scène, Jésus lui se saisit des cœurs, mezza voce. Cela fait forcément moins de bruit.

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