Tout triste

Lundi, 20° semaine du Temps Ordinaire

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (Mt 19, 16-22)

Il y a la liberté humaine ! Celle-là même qui fait s'en aller ce jeune homme riche que Jésus croise un jour, et qui, peut-être, aurait été un très grand apôtre ! Son nom d'ailleurs demeure à jamais caché dans le cœur de Dieu. Marc ajoute au récit de l'épisode cette notation émouvante : Jésus le regarda et se prit à l'aimer (Mc10-21). La tendresse était là…mais la tendresse n'est pas magique, ni hypnotique. Elle laisse libre. Il y a eu aussi Judas. Quand le même évangéliste fait l'inventaire des douze apôtres, il ne retouche pas la photo, à la soviétique, et finit la liste par le nom de Judas, celui-là même qui le livra (Mc3-19).

Comment le Christ, qui savait tout, les regarda-t-il au premier jour, ces hommes et ces femmes qui n'ont pas répondu jusqu'au bout et à cœur déployé ? On voudrait repasser le film, guetter en Jésus le moindre signe précurseur. Aucune erreur de casting pourtant. Il sait tout mais les choisit tous tout de même. Car Dieu nous regarde toujours sans calcul. Il nous regarde au présent, et jamais à partir du mal, passé ou à venir, dont il ferait déjà le compte. La tendresse ne découpe pas, elle prend en entier tout l'être, et selon le bien uniquement, son seul angle d'attaque ! Sachant tout de Judas, ou du jeune homme riche, Dieu les a ainsi vraiment envisagés, choisis, avec tendresse et sans arrière-pensée.

Il l'a regardé s'éloigner, ce jeune homme à qui il pense, comme il pense à chacun de nous, avec un pincement au cœur, quand nous passons notre chemin. Oui, il aurait pourtant fait un fameux apôtre ! Mais il avait de grands biens. A la différence de Judas toutefois, on ne sait pas comment l'histoire avec lui s'est terminée et s'il a fini, un jour, par lâcher ses biens, et surtout sa tristesse… Dieu est du genre à repasser ! Et le pire, comme dit Claudel, n'est jamais sûr.

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