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Les Pharisiens qui aimaient l’argent

Samedi, 31 e semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 16, 9-15) Petit débat grammatical dans le passage d’évangile du jour : de quelle nature est la proposition subordonnée relative ? Les traductions semblent hésiter un peu. Explicative ou déterminative, comme diraient les grammairiens ? Soit : « les pharisiens, eux qui aimaient l’argent… » Tous dans le même sac ! Explicative, elle essentialise un groupe et l’affecte par nature d’une tare de cupidité. Jésus pécherait alors par généralisation, et poserait là la première pierre d’un antijudaïsme dont on sait hélas la fortune et les effets. (Lire à cet égard le tout récent et très utile Déconstruire l’antijudaïsme Chrétien de la conférence des évêques de France). Soit, « les pharisiens, ceux qui aimaient l’argent, (mais pas les autres…) ». Déterminative, elle spécifie. Dieu en vérité n’est pas communautariste. Il ne s’adresse pas à des groupes, ne stigmatise aucune communauté. C’est à...

Habileté des fils de ce monde

Vendredi, 31 e semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 16, 1-8) Jésus prend-il le parti des filous ? A identifier le maître à Dieu, et des paraboles le suggèrent parfois, on est dérouté par la morale d’une histoire pas très catholique ! Ce gérant trompeur, le maître en fit l’éloge . Un comble ! De fait, il avait trouvé la bonne combine. Trafic d’écriture, faux et usages de faux, on n’est pas loin de la magouille avérée. Cet économe habile entame-t-il ici un chemin de sainteté ? Qui sait ? Imaginons un brave homme qui doit gagner sa vie, dans un monde tel qu’il était déjà : un monde où l’argent est roi. Il fut un jour dénoncé (par qui ?) parce qu’il gaspillait les biens du maître : d’emblée, on est du côté de la finance ! De quelle nature était ce gaspillage, après tout ? Peut-être en redistribuait-il un peu aux plus pauvres ? Rêvons ! Le voilà menacé de licenciement par un bien plus riche et plus endurci que lui.

J’ai retrouvé ma brebis !

Jeudi, 31 e semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 15, 1-10) Rien de moins raisonnable, de plus provocateur, que la parabole de la brebis perdue ! Jésus fait comme si les choses allaient de soi et se montre très optimiste sur notre art d’être bons bergers. Il fait sur ses auditeurs un pari audacieux, pas gagné d’avance : « Si l’un de vous a cent brebis et en perd une, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il la retrouve ? ». C’est en discussion chez les éleveurs ! Il est en effet des comptabilités plus pragmatiques. Après tout, on n’est pas à une brebis près. Une de perdue, et dix de retrouvées, ou du moins, plus de quatre-vingt-dix prudemment préservées. Et après tout, comme le dit la fable, mieux vaut tenir que courir. N’est-il pas en somme assez hasardeux d’aller courir après la fofolle buissonnière ?

Porter sa croix

Mercredi, 31 e semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 14, 25-33) Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher derrière moi ne peut pas être mon disciple . Combien d’hommes et de femmes ont buté sur cette parole à première vue peu engageante. La croix fait peur, et notre époque, peu encline à l’ascèse et moins encore au dolorisme, se rebiffe naturellement contre une telle invitation. On veut porter bien des choses : porter beau, se bien porter, porter un tatouage ou même porter le voile, mais porter sa croix… L’expression sonne ringard.À quoi bon se résigner encore à supporter sa propre misère quand on nous présente partout des méthodes pour vivre mieux, plus zen, ou plus cool ? La croix, ce n’est pas très fun : il s’agira donc surtout de s’en alléger, pour ne pas dire de s’en débarrasser. S’agit-il de cela ? Le Christ recrute-t-il donc des disciples d’un autre temps, prédisposés à un certain masochisme ? Celui qui ne porte pa...

Il reste encore de la place

Mardi, 31 e semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 14, 15-24) Venez, tout est prêt . D’où vient cette parole, sinon du cœur profond du Père ? La table du Royaume, depuis l’origine, il la prépare avec amour et veille sur la place de chacun. C’est qu’il veut faire de tous un invité de marque. Il nous veut convive : quel beau mot ! Convive , pour qu’avec lui, à jamais, nous vivions, ensemble. Voilà ce qu’avait bien compris cet homme fervent en qui monte une béatitude : Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu !  Jésus a dû s’émerveiller d’un tel élan de foi, lui qui nous appelle si souvent à une spiritualité de la commensalité. En retour, il lui offre une parabole, comme une confidence.

Quand tu donnes une réception.

Lundi, 31 e semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 14, 12-14) Jésus bouscule les lois mondaines du bien recevoir. Sans doute taquine-t-il un peu son hôte, chef des pharisiens qui l’avait invité à dîner. Au risque de bafouer l’usage et de manquer aux manières ordinaires de la courtoisie, Jésus ne rendra donc pas l’invitation ! Il va même jusqu’à faire de l’entorse une règle de la vie chrétienne. Le potlatch n’est pas évangélique. Que nos dons soient vraiment gratuits, et libres de tout calcul ! Aucun retour sur investissement à espérer !

La Toussaint : lucarne sur la vie du Ciel

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Samedi, 30° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (Mt 5, 1-12a) Un jour par an, au creux de l’automne, nous fleurissons les tombes de nos cimetières. Pour beaucoup, cette coutume est sacrée et il faudrait n’avoir pas de cœur pour trouver ridicule cette fidèle démarche de l’affection. Et pourtant, est-il chrétien de réduire la Toussaint, la grande fête de l’Église totale, à la commémoration de ce qui n’est plus ? N’est-il pas regrettable de laisser dégénérer le 1er novembre en journée du souvenir et de la mélancolie, comme si nous n’avions plus d’espérance ? Il est légitime de porter des fleurs sur une tombe : mais combien est-il plus urgent encore de renouer ces liens de famille avec le Ciel. C’est un grand ressort de l’existence terrestre que de ne jamais oublier le lien mystérieux avec la foule de nos ancêtres qui peuplent l’Éternité. Oui, d’ores et déjà, nous sommes enfants des saints. La filiation est certaine, c’est une grâce ! Au c...

Question de Jésus

Vendredi, 30° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 14, 1-6) S’il y a une sensibilité juive de laquelle Jésus se sent proche, ce sont bien les Pharisiens. Il est regrettable que dans la culture chrétienne ordinaire, le mot ait pris un sens péjoratif, et qu’il finisse par signifier l’hypocrisie ou la psychorigidité dans l’application de la Loi. Comme Jésus a dû les goûter, tous ces moments de partage avec ces cœurs ardents de jeunes (et de moins jeunes) pharisiens, tournés vers l’absolu avec une exigence et une intensité admirables ! Jésus ne vient pas d’abord leur donner des leçons. Il entre fraternellement chez eux, y prend son repas. Sans réserve, il célèbre en leur compagnie le sabbat. Parce qu’il les aime d’un amour tout particulier, il désirerait que, chez eux plus que chez quiconque, s’accomplisse au plus profond de leur cœur la fine pointe spirituelle de la sensibilité exigeante qui caractérise leur belle communauté.

Jérusalem, Jérusalem

Jeudi, 30° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 13, 31-35) Jérusalem, Jérusalem…combien de fois j’ai voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes… A qui parle Jésus ? La confidence est assez émouvante. Elle a des allures d’aparté. Jésus est en train de répondre aux pharisiens qui brandissent la menace d’Hérode, et voilà tout à coup que le mot Jérusalem arrive sur ses lèvres. Un mot-clé, qui touche au cœur, ouvre sur l’intime de sa mission et le plonge dans une méditation douloureuse, tant ces quatre syllabes articulent en lui l’objet d’une tendresse particulière. « Jérusalem ! » A ce mot seul, Jésus décroche un instant du dialogue direct avec ses interlocuteurs, passe soudain sur un autre plan.

La porte étroite

Mercredi, 30° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 13, 22-30) Le Royaume de Dieu, un club hyper sélect ? Elle en a fait couler des paroles, cette fameuse « porte étroite » ! De tous les enseignements de Jésus, sans doute l’image la plus risquée, la plus mal comprise, la plus détournée. Elle a acclimaté dans les esprits la représentation d’un Dieu sélectif, juge impitoyable et mis dans les cœurs l’idée d’une aristocratie céleste. Un de ces malentendus majeurs entre Dieu et les hommes, il en est tant ! On a fondé sur elle toute une catéchèse de la peur et du mérite, toute une théologie de la prédestination. Dieu soudain n’a plus le cœur grand ouvert ! Jusqu’à ces terribles crucifix jansénistes que resserrent l’empan des deux bras du Christ en croix vers la verticale, comme pour réduire drastiquement le champ du salut.

Douze, auxquels il donna le nom d’apôtres

Mardi, 30° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 6, 12-19) On les connaît bien, les douze apôtres que Jésus appela, mais on aime réentendre égrener cette belle litanie de noms : Simon, André, Jacques, Jean, Philippe… Tous présents à l’appel ! La liste reste émouvante. Un lien de parenté vient parfois authentifier la vérité d’une existence, ramener le prestige dont l’histoire sainte les a revêtus à la simple réalité de ce qu’était leur vie ordinaire de pêcheurs de Galilée : Jude, fils de Jacques, Simon appelé le zélote, Jacques fils d’Alphée… Arrive le nom de Judas, et cette simple notation, poignante de pudeur et de discrétion : celui qui fut le traître. Ici, pas question de refaire l’histoire, de retoucher la photo pour supprimer l’élément gênant, comme certains régimes totalitaires ne s’en privent pas. Il est là, avec les autres. Certes, en fin de liste ; peut-être moins pour le disqualifier que pour mettre à l’horizon d’une ...

Délivrer, le jour du sabbat

Lundi, 30° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 13, 10-17) Jésus a aimé le sabbat plus que quiconque ! De doux souvenirs des sabbats familiaux à Nazareth, il en a plein la tête. Il revoit sa mère en faire le pain. Il revoie Joseph lui apprenant à dire le Kiddoush sur la coupe de vin. Il en a aimé les règles, l’exigence et la joie. Comme personne, il en sait le prix, en comprend la valeur. Lui qui est Dieu, il sait bien quelle pédagogie le Père a déployé en demandant de telles exigences rituelles à son peuple, pour le sanctifier, pas pour le corseter. Mais du haut de ses meilleures intentions, Dieu avait-il tout vu ? Maintenant qu’il est venu habiter parmi les hommes, son regard ne peut plus être exactement le même. Homme parmi les hommes, il prend fait et cause pour eux d’une manière très inédite. Par sa venue dans le monde, les temps vont donc changer, et les règles aussi : voici qu’il y eut ce jour-là, à quelques mètres de lui, un...

Pas au centre, mais au coeur

Dimanche, 30° dimanche du Temps Ordinaire - Année C Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (18, 9-14) Frères et sœurs, il ne s'agit donc pas seulement de monter au Temple pour prier, il s'agit aussi de bien voir où l'on s'y place, et comment l'on s'y tient ! Notre pharisien et notre publicain d'aujourd'hui sont sans doute montés au Temple d'un même pas, mais pas exactement d'un même cœur. Chez le notable du jour, qui lui est un peu trop monté , en effet, tout est haut, très haut placé ! Sa voix d'abord : on l'imagine parlant à voix haute, le ton un peu perché. Son placement physique dans l'édifice ? En haut du transept plutôt que dans les derniers rangs, et plutôt au centre. Et bien sûr, sa haute, sa très haute idée de lui-même ! Sa prière pourtant commençait bien, comme une eucharistie. Mon Dieu, je te rends grâce … Mais vite, elle tourne mal et se gâte sur pied : son oraison à peine entamée se mue aussitôt en...

Plus coupables ?

Samedi, 29° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 13, 1-9) Meurt-on tragiquement à proportion de notre péché ? Si seulement ceux à qui il arrive malheur étaient plus coupables que les autres ! Le mal ne serait plus énigmatique mais légitime. Et la religion une simple pré-distribution des mérites respectifs. Des cœurs s'insurgent contre cette logique comptable et, déboussolés par l'affaire des Galiléens, vont s'en ouvrir au Christ. Et Jésus voudrait bien leur en dire plus, leur parler déjà de la « communion des saints », de ce grand et bouleversant mystère dans lequel on ne sait jamais bien pour qui l'on vit et pour qui l'on meurt, surtout quand on donne sa vie, dans cet ultime face à face avec Dieu, qui arrive parfois de façon bien injuste ou imprévue. Il aimerait tant que nos bons récriminateurs du jour devinent qu'aux abords du Temple et un jour de Pâque, comme les Galiléens, c'est lui bientôt qui ver...

Vous savez interpréter l’aspect du ciel et de la terre

Vendredi, 29° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 12, 54-59) Il arrive à Jésus d'avoir envers nous des impatiences d'amour. Avec tout ce qu'il nous enseigne, inlassablement, ce qu'il nous montre et réalise devant nous, et tout ce que nous ont déjà transmis les Écritures, il nous rêve plus perspicaces. Quand il nous regarde exercer notre talent d'interprète, il voit que nous nous débrouillons assez bien avec la météo. Même avant les satellites et les moyens techniques modernes, la sagesse des anciens savaient en effet lire les signes du ciel et prévoir le temps. Discerner le temps qu'il fera, il y a deux mille ans, on était déjà assez bon ! Mais discerner les signes des temps, comprendre avec finesse ce que nous vivons et à quel moment de l'histoire spirituelle du monde nous nous trouvons, c'est beaucoup plus compliqué ! C'est d'un tout autre soleil qu'il aimerait

Familles divisées

Jeudi, 29° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 12, 49-53) Chercheurs de religion à l'eau de rose, pacifistes lénifiants, passez votre chemin ! Les paroles du Christ ne relèvent pas du « spirituellement correct ». Loin des discours consensuels et sirupeux qui font la recette des sectes, loin des propos bien-pensants dont la famille est parfois l'objet, ce sont des mots exigeants, où l'appel de la vérité ne sacrifie pas au mythe illusoire de l'unité familiale. Faut-il alors craindre la division que le Christ promet de mettre au sein même des familles ? La famille est une belle réalité humaine que le christianisme valorise et bénit. Mais en soi, elle n'est pas sacrée. Parce que ses membres sont pécheurs, quelle famille est à l'abri des divisions ? Le rêve irénique d'une famille unie à tout prix peut ne pas être vraiment évangélique s'il est poursuivi sur

A qui l’on a beaucoup donné, on demandera beaucoup

Mercredi, 29° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 12, 39-48) Des situations qui parlent d'elles-mêmes, des histoires de voleurs et de volés, de maîtres et de serviteurs qui sont toutes assez éloquentes. Jésus est juif, il aime les histoires ! Et il en raconte aux hommes, inlassablement, tant son cœur déborde. C'est aussi que Dieu prend au sérieux notre façon de conduire notre vie et notre aventure de la terre, et veut nous y aider. Pas qu'il nous veuille soumis, ni rivés à ses intérêts, comme un créditeur impitoyable. Pas davantage comme un Père Fouettard menaçant, car les coups qu'on peut prendre et dont il parle, c'est moins lui qui les donne que la vie qui souvent s'en charge. Bien plutôt, il veille sur nous et aujourd'hui nous presse à une vigilance et à une prévoyance ajustée. Ailleurs, il nous encourageait à vivre au jour le jour, lui qui nous donne, telle la manne, notre pain quotidien ; ailleu...

Comme des gens qui attendent

Mardi, 29° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 12, 35-38) Jésus invite ses disciples à être « comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces ». Aujourd'hui, il est vrai, il n'y a plus beaucoup de maîtres pour se faire une idée, et guère plus de noces… Encore moins de gens qui savent vraiment ce qu'est l'attente. Dans notre monde pressé, tout est conçu pour la supprimer. « N'attendez plus ! », le slogan publicitaire se décline partout. De l'attente, c'est à qui coupera la file. Le découragement existentiel n'a pas d'autre verbe. La fin des utopies a sonné le glas d'une confiance en l'avenir. Nous sommes désabusés. On veut beaucoup et vite, mais on n'attend plus rien. Plus rien, ni plus personne. La vocation chrétienne dans le monde d'aujourd'hui ? Attendre, précisément. Tout attendre, d'une attente presque sans objet, à la mesure du désir humain, i...

Quand on va te redemander ta vie

Lundi, 29° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 12, 13-21) Faire le plein, remplir ses greniers ! L'avidité est de tous les temps. Il est vrai que notre époque, sur fond de convoitise mais aussi d'angoisse et de perte de sens, dispose tout particulièrement à cette démesure-là. « La vie de quelqu'un, même dans l'abondance, ne dépend pas de ce qu'il possède » . On finit par l'oublier. Alors Jésus nous alerte, avec une grande sagesse. On aurait aimé entendre aussi son intonation, son émotion, lui qui ne cherche pas d'abord à nous corriger moralement de nos inconduites ni à rectifier nos écarts. Éperdu qu'il est de nous, il cherche surtout à nous épargner les mauvais choix et à nous sauver de tout ce qui nous abîme et nous détruit. Il se désole de notre folie à entasser toujours plus et sa parabole est éloquente : il est en effet bien avancé, ce malheureux riche, plein aux as, au moment où il faut quit...

Sans cesse

Dimanche, 29° dimanche du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (18, 1-8) L'évangile fourmille de trognes en tout genre ! Autant de visages de notre humanité ordinaire, une formidable galerie de portraits qui font de ce livre une toile de Breughel, bien plus qu'un traité morale ou de bondieuseries ! On y croise ainsi des personnages pas toujours bien recommandables ni des modèles ! Tous à leur façon donnent visage et corps à nos petites affaires, nos petites bassesses, nos petites misères. Là un intendant malhonnête (mais futé), ici un riche insensé, des mauvais vignerons, un fils prodigue ou un jeune homme irrésolu, et tant d'autres vignettes de notre humanité bigarrée. Aujourd'hui une veuve, vraiment très casse-pied, très importune, et un juge embourgeoisé et planqué qui n'agit que pour qu'on lui fiche la paix ! La parabole, avouons-le, n'est pas à l'avantage de Dieu, qui accepte une comparaison peu flatteuse...

La moisson est abondante

Samedi, 28° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 10, 1-9) La moisson est abondante mais les ouvriers peu nombreux . La formule est devenue proverbiale, elle sert souvent, et à juste titre, de verset d'évangile de référence pour les prières pour les vocations. Elle sensibilise ainsi au manque de bras, à la crise du recrutement qui, aujourd'hui, n'affecte pas que le monde de l'enseignement, celui de l'hôpital ou de la restauration, mais aussi l'Église ! Il s'agit donc, comme le demande Jésus, de prier le maître de la moisson d'envoyer des ouvriers pour sa moisson. Dont acte. Mais met-on assez d'espérance dans cette prière, teintée de mélancolie dès qu'on regarde les chiffres ? C'est de la pénurie d'ouvriers dont parle Jésus, mais pas du tout de la pauvreté de la moisson ! La moisson est abondante ! Prête-t-on assez attention au début de la formule ? Car il y a un maître de la moisso...

Les cheveux de votre tête sont tous comptés

Vendredi, 28° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 12, 1-7) Les cheveux de votre tête sont tous comptés. Une image capillaire assez insolite, propre à faire pâlir les meilleurs coiffeurs et méditer les chauves en puissance. Touchante en vérité. Pas que Dieu nous menace de ne rien laisser passer dans nos vies. Pas tellement qu'il nous demandera des comptes, le moment venu, au cheveu près. Pas qu'il se dissimule finalement dans toute chose, la plus infinitésimale, qu'il est derrière la chute ou la poussée du moindre de nos cheveux, comme le Dieu très puissant d'autres cultures religieuses, qui régit directement le monde aussi bien dans les causes secondes que dans les causes premières, excluant ainsi toute liberté véritable et tout ordre propre à la création. Les cheveux de votre tête sont tous comptés. Bien plutôt comme

Cette génération devra rendre compte

Jeudi, 28° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 11, 47-54) Il en a coulé du sang, depuis la fondation du monde. En Jésus, qui est Dieu, remonte soudain une liste fournie de noms de prophètes, de doux et d'innocents (Abel), de prophètes ou d'envoyés de Dieu qui ont été massacrés. Ceux qu'avec le Père, lui-même avait envoyés au milieu des hommes pour ramener le monde à plus d'amour, combien ont été mis à mort ? On sent en lui l'intensité de l'émotion, à la mémoire de tant de vies dont le sang a été versé. Et il voit bien les compromissions, et vilipende à travers ces docteurs de la loi, scribes et pharisiens, cette part de nous qui n'accueille pas ceux que Dieu envoie, ou pire, les extermine. L'accusation est douloureuse mais comment comprendre qu'elle vise plus particulièrement cette génération à qui il s'adresse, qui devra rendre compte du sang de tous les

Malheureux êtes-vous

Mercredi, 28° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 11, 42-46) Voilà aujourd'hui une vigoureuse parole, une sorte de discours des béatitudes inversé, qui passe en revue tous les loupés possibles de la bonne conscience des pharisiens. Pas tant pour les maudire que les convertir à l'essentiel. Dans la péricope de ce jour, nous avons ainsi les paroles d'avertissement que Jésus leur adresse pour les aider à prendre conscience de leur légalisme, voire de leur hypocrisie. Mais, comme il faut bien découper l'évangile en morceau, et ménager les sutures, l'usage liturgique de la liturgie de la parole ménage souvent une petite clausule introductive, dont le but est d'amener plus naturellement l'évangile du jour. Une petite indication initiale, qui ne mange en vérité pas de pain, et qui se contente d'une vague situation des conditions de l'énonciation dans laquelle, en ce temps-là, Jésus disait . Mais ce ...

Jésus entra chez lui et prit place

Mardi, 28° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 11, 37-41) Toutes les exigences de la Loi, dans ses moindres détails, ablutions comprises, n'ont jamais paru ridicules à Jésus. Israël est à jamais le peuple sacerdotal ; il avait mystérieusement fallu que pendant des générations, ces hommes portent le joug exigeant d'une Loi, très bonne en vérité à restaurer de l'humain en l'homme et de réparer sa relation à Dieu. La mission de ce peuple : expérimenter dans sa chair l'alliance et paradoxalement, par la Loi, ouvrir le chemin d'une libération : « l'homme est serf par la nature et libre par la Loi » écrivait Lévinas. Mieux que personne, Jésus sait bien, de ce peuple, le sien, tout le mérite, la fidélité et l'engagement au fil des âges dans le service de la Loi. Et notamment les admirables pharisiens, une communauté juive dont il est si proche ! Oui, à l'égard de son peuple, Jésus s'émerveille. M...

La reine de Saba se dressera

Lundi, 28° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 11, 29-32) Devant tant d'iniquité, Jésus s'irrite. Pas comme un Dieu de colère, vengeur et impitoyable, mais comme un Dieu sensible, atteint au cœur par le mystère du mal et sa capacité à défigurer l'homme, et par les complicités que nous avons souvent avec lui. Quelle génération n'est pas mauvaise, au sens où le mal n'aurait pas trouvé en elle de quoi s'infiltrer une fois encore dans l'histoire humaine ? Ne sachant plus comment toucher les cœurs, Jésus s'anime et va jusqu'à raviver la mémoire de la Reine de Saba. Bel hommage à l'étrangère venue en son temps en ambassade jusqu'à la sagesse de Salomon, poussée par on ne sait quelle intuition divine. Jésus dit alors qu'au jugement, elle se dressera en même temps que

Une voix au milieu de la foule

Samedi, 27° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 11, 27-28) Il était en train de parler : sans doute essayait-il à ce moment-là d'éclairer pour eux l'aventure humaine, de leur révéler un peu du dessein du Père, de leur laisser deviner la part mystérieuse que lui, Jésus, y prenait. Il leur parlait de l'importance de la Parole. Et voilà qu'un cœur de femme déborde, et s'émerveille, de façon intempestive mais si spontanée ! Belle embardée d'enthousiasme, mais qui parasite la conférence et oblige à une brève interruption de séance. Il est touchant, ce petit échange entre elle et lui : comme une incise tendre et pleine d'humour, qui tourne à un souriant jeu du qui dit mieux ! Oui, émouvant, ce petit concours de béatitude ! Elle avait bien raison, cette brave femme, de célébrer l'heureuse mère qui a porté et nourri un tel fils ! Mais Jésus, sans ego, surenchérit sur le propos de la femme et déplace illi...

Par le doigt de Dieu

Vendredi, 27° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 11, 15-26) Il aurait donc partie liée avec le chef des démons. Les adversaires de Jésus n'ont rien trouvé de plus odieux. Jésus consent pourtant, incroyable sollicitude, à répondre, à les ramener à la raison, comme si la logique pouvait ici être d'un grand secours. Si vous dites vrai, alors le démon combat le démon. Argument de bon sens, imparable. Comment soutenir que Jésus agit par Béelzéboul, alors que toute son activité est dirigée contre lui, depuis le terrible duel au désert. Absurde. Il aura donc tenté de répondre. Pas par le diable, mais par Dieu. Dieu seul, dont il est l'instrument. S'il expulse les démons, c'est, dit-il, par le doigt de Dieu qu'il le fait. Singulière précision. C'est suggestif de voir qu'il n'invoque pas tant ici Dieu que… son doigt. Curieux détail, anatomique, pour mieux évoquer et incarner l'œuvre

Demandez, on vous donnera

Jeudi, 27° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 11, 5-13) On veut bien le croire : Dieu n'est jamais sourd aux demandes des hommes. Pourtant, le doute nous traverse quand une prière faite à Dieu n'a pas la réponse attendue. Notre recours à la prière, fort de la formule « demandez , on vous donnera ! » n'est pas toujours exempt de magie, il arrive qu'un réajustement purificateur s'impose. Le fruit de la prière, c'est parfois une libération : accepter de se désapproprier d'un vouloir humain tout puissant, dans lequel on avait tenté par la prière de faire entrer Dieu. Et pourtant : « Demandez, on vous donnera ». Jésus insiste. Jésus persiste. Il cherche à donner l'incroyable mesure du cœur du Père ; en un mot, sa miséricorde, jamais

Notre Père

Mercredi, 27° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 11, 1-4) On ne saura jamais le nom du disciple qui posa l'heureuse question. C'est que la question est sur les lèvres de chacun. Comment prier ? Jésus ne se dérobe pas et en quelques mots qu'il assemble et transfigure de la tradition juive, il nous donne le Notre Père. C'est dans le changement de personne du pronom possessif que l'essentiel s'est peut-être joué. Il nous apprend à dire Notre Père , pas Mon père. Première personne du pluriel, non du singulier ! C'est que l'amour de Dieu, même s'il est personnel, est à l'œuvre de façon mystérieusement commune. Nous nous portons les uns les autres, nous

Une seule est nécessaire

Mardi, 27° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 10, 38-42) Une cigale attentive, une fourmi ici généreuse, voilà une petite fable évangélique dont la morale n'est finalement pas si simple. L'une est assise, sponsale, buvant la Parole. C'est l'immobile et éternelle Marie, celle qui sait aussi verser larmes et parfum. L'autre industrieuse, toute donnée au service, est un peu accaparée. L'une donc était l'oreille, l'autre la main. Et voilà que la main contre l'oreille s'emporte, et le corps tout entier alors a mal. À défaire soudain, un nœud : un rien d'amertume, et l'énergie tout à coup circule mal dans le corps-disciple, divisé désormais et désarticulé. Il y a plusieurs membres, et cependant un seul corps. Et la main ne peut dire à l'oreille : Je n'ai pas besoin de toi (1 Co 12, 19-21). Jésus se fait donc ici ostéopathe, pour redonner unité au corps. Quelle est la bonne pa...

Ce que tu auras dépensé en plus

Lundi, 27° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 10, 25-37) On a beau la connaître, cette parabole du Samaritain. C'est toujours avec émotion qu'on relit le détail de sa compassion en acte. L'évangile a voulu, c'est magnifique, nous faire l'inventaire précis de tout ce qu'il fait pour ce pauvre homme. Il le voit d'abord ! Il ne reste pas à distance mais s'approche et panse ses blessures , avec de l'huile et du vin , une pharmacopée de prix où déjà passe tout son amour. De quoi, dans l'invisible, faire de tout acte de charité un sacrement. Il le charge sur sa propre monture , pas sur une monture d'appoint, et le conduit dans une auberge où il prend soin de lui jusqu'au lendemain. Mais la pointe le plus fine de la fameuse parabole du Samaritain n'est pas encore là ! À l'aubergiste, à qui il le confie, il a cette incroyable parole, à laquelle on prête trop peu attention : pr...

[Podcast] Croire sur parole en l'impossible

Dimanche, 27° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 17, 5-10) Commentaire de l'évangile du jour diffusé sur RCF

Vos noms, inscrits dans les cieux

Samedi, 26° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 10, 17-24) Ils revenaient pourtant tout contents de leur succès : Ne vous réjouissez pas parce que les esprits vous sont soumis ; mais réjouissez-vous parce que vos noms se trouvent inscrits dans les cieux . Les apôtres s'attendaient à la bénédiction de leurs petites victoires sur le mal, mais Jésus enracine la bénédiction plus profondément, pour désensabler la vraie Joie ! Vos noms se trouvent inscrits dans les cieux ! Comment mieux dire une bienheureuse prédestination d'amour, à laquelle, par chacun de nos noms singuliers, nous sommes appelés à répondre. Chacun a donc sa partition à jouer, elle est unique, et le monde l'attend. A l'histoire du monde, personne d'autre que nous n'apportera en propre ce que chacun a d'unique à donner. Quel programme ! Quelle

Diversité des territoires

Vendredi, 26° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 10, 13-16) La passion égalitaire qui caractérise nos sociétés nous rend difficiles certaines paroles du Christ, qu'on préfère en doux apôtre de la Paix plutôt qu'en Dieu vrai et exigeant. On a même rêvé d'expurger certains passages violents ou affirmations déroutantes de Jésus qui viennent parfois contrarier l'image mystico-plaisante qu'on préfèrerait de lui. Comparés à Tyr et Sidon, Corazine, Bethsaïde et Capharnaüm font ici les frais d'un authentique emportement divin. Dans ce bas monde, tout le monde n'est donc pas ni beau ni gentil : et la menace pour eux est bien réelle. S'adressant à Capharnaüm, Jésus ne mâche ainsi pas ses mots, dans ce qui ressemble à une malédiction : « Tu descendras jusqu'au séjour des morts ! ». Bien plutôt un avertissement, anxieux qu'il est du salut d'une petite ville qu'il aime. C...

Leurs anges dans les cieux

Jeudi, 26° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (Mt 18, 1-5.10) Les anges gardiens sont-ils désuets, font-ils partie du folklore catho, version pieuse de la bonne étoile ? Jésus lui-même est pourtant bien clair, qui parle de ces anges dans les cieux qui voient sans cesse la face de mon Père qui est aux cieux . La répétition nous avertit : il faut vraiment quitter la terre, sa logique, et passer au Ciel , pour contempler bien les réalités spirituelles qui le compose. Entrer dans le grand mystère du ciel et de la vie invisible, celles des anges, dont Jésus ne fait clairement pas une option facultative. Pourquoi cependant évoque-t-il l'existence des anges gardiens à propos des petits enfants, en précisant : « Gardez-vous de mépriser un seul de ces petits, car, je vous le dis, leurs anges dans les cieux voient sans cesse la face de mon Père » ? Sans doute pour donner toute leur dignité spirituelle à ces enfants que le...

Un endroit où reposer la tête

Mercredi, 26° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 9, 57-62) Florilège émouvant de paroles d'hommes glanées au fil des chemins. A chaque fois, le même élan, la même embardée : les hommes sont ainsi. Qu'il est beau ce franc dynamisme de l'engagement premier. La radicalité superbe des intentions ! Je te suivrai partout où tu iras ! Un cri du cœur, magnifique. Mais les jambes ? Du côté de l'intention, vraiment rien à dire… Jésus, qui ne connaissait pourtant pas La plaisante Sagesse lyonnaise, sait bien hélas que « le tout, c'est pas d'y dire, mais d'y faire. ». Il est bien terrible, l'éternel petit nota bene de réserve, la clause de restriction pour les urgences, la dédite prévue en cas de priorité. Oui, mais . Il y a donc souvent un mais ! Jésus a dû en prendre son parti : il suscite à l'évidence de l'enthousiasme, mais au fond, il n'est jamais prioritaire. Les hommes ont toujours mieux...

Le feu du Ciel ?

Mardi, 26° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 9, 51-56) Douloureux moment que celui au cours duquel les apôtres se cognent sur la terrible liberté de ces hommes qui refusent de recevoir Jésus. Un bien mauvais endroit que ce triste village de Samarie. Aujourd'hui, c'est le monde entier qui est plus ou moins à l'image de ce village inhospitalier et fermé de Samarie. Les fermetures de cœur ont toujours évidemment leurs bonnes raisons. Ici, à Samarie, de vieilles histoires, d'anciennes querelles de chapelle… Jésus se dirige vers Jérusalem, ce qui ne leur va pas, car eux, ils adorent ailleurs. S'ils savaient en vérité vers où il se dirige. On refusa de le recevoir . Est-il dans l'évangile phrase plus douloureuse ? La raison en est peut-être bien dérisoire, mais la réalité implacable. Aussi les vigoureux apôtres, tout pleins des ardeurs de la mission et remplis de zèle, ont alors une drôle d'idée : qu'...

Sous le figuier

Lundi, 26° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 1, 47-51) Émouvante rencontre que celle de Jésus et de Nathanaël ! L'homme s'avance. Et, débordant de tendresse et d'admiration quand il voit la pureté de son cœur, Jésus laisse alors paraître tout haut son émotion. Nathanaël s'en étonne. D'où me connais-tu ? dit-il alors à ce jeune rabbi qu'il n'a jamais vu. Avant que Philippe t'appelle, quand tu étais sous le figuier, je t'ai vu . Un aveu de taille, touchant en vérité, et qui en dit long sur l'attention de Dieu. C'est donc que Jésus nous regarde, sous le figuier , avant même que nous nous avancions vers lui. Il nous voit, il nous envisage. Il contemple, au-delà de ce que nous en savons, la profonde et mystérieuse vie théologale qui est en nous. En nous, le plus petit ferment de sainteté ne lui échappe pas. Il nous espère. Et il le fait quand nous sommes sous le figuier , c...

L’interroger sur cette parole

Samedi, 25° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 9, 43b-45) Ils avaient peur de l'interroger sur cette parole. Est-ce la gravité soudaine dans la voix du Christ ? La perspective est en vérité tellement incroyable que, chez les apôtres, elle ne donne lieu alors à aucune question. Elle les laisse de marbre, comme abasourdis. C'est en effet à n'y rien comprendre. Celui qui, à leurs yeux, à n'en plus douter, est assurément le fils de Dieu, le Messie tant attendu d'Israël, qui a déjà fait tant de miracles, parlé avec autant d'autorité, qu'il encourt le risque d'être bientôt « livré aux mains des hommes » , c'est totalement impensable ! Non pas qu'ils soient si sûrs que cela des hommes. Ils savent bien que lesdits hommes sont souvent capables du pire, mais ils sont sûrs de Dieu ! Ils sont désormais certains que, quoi qu'il arrive, quelles que soient les hostilités qu'ils rencontrero...

Qui suis-je ?

Vendredi, 25° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 9, 18-22) A l'évidence, deux cercles autour de Jésus. La foule d'un côté. Elle a entendu ce Jésus de Nazareth parler comme peu d'hommes ont parlé. Elle l'a vu à l'œuvre, le long des chemins, guérir ici, délivrer là, relever tel passant de sa misère profonde. Saisie par le caractère extraordinaire de ce Jésus, elle s'est bien sûr interrogée. Qui est-il donc ? Jean-Baptiste ? Elie ? La résurrection d'un ancien prophète ? Mais au fond, peu importe. La foule n'ira pas plus loin, s'attachant surtout à recevoir d'abord ce que cet homme étrange et providentiel lui apporte de précieux : son enseignement, ses charismes, ses miracles surtout. Qui est-il en vérité ? La question est pourtant d'importance, car ce que Dieu veut donner aux hommes, ce sont moins ses bienfaits ou ses dons particuliers que lui-même. Jésus n'a d'autre attente...

Il cherchait à la voir

Jeudi, 25° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 9, 7-9) Hérode commence à être troublé par ce qu'on dit un peu partout de cet homme de Nazareth. Il n'est pas à une vie près, il a déjà sacrifié celle du Baptiste aux manigances d'une femme manipulatrice, et du coup, il pensait bien en avoir fini avec les remous autour de ce petit groupe d'illuminés qui font un peu trop parler d'eux. Mais il ne suffit pas de supprimer quelqu'un pour épuiser son mystère, il ne suffit pas de mettre à mort pour mettre fin à un mouvement de conversion et d'amour qui monte et se diffuse. Qui donc est cet homme dont l'aura puissante se dessine maintenant derrière celle de Jean le Baptiste ? Est-il une menace ? Que dit-on de lui ? Ce n'est pas l'attention vraie qui est en alerte chez Hérode, celle qui dispose en profondeur l'ouverture du cœur et l'accueil, prémices de la foi et peut-être de la conversion...

De là que vous repartirez

Mercredi, 25° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 9, 1-6) La lettre de mission est assez claire. Esprit de pauvreté, abandon à la Providence. Pas de chaussures de rechange ni tunique de secours. Aucun contrat d'assurance. Ni sac ni bâton, le voyage se fera donc sans armes ni bagages. La carte de l'itinéraire se déploie en revanche sur de grandes largeurs. Il s'agit de ne pas chômer ! C'est que les besoins sont grands, et les malades nombreux. Menace de suractivité ? Les apôtres, étant partis, passèrent bien « de village en village » , pour annoncer la Bonne Nouvelle et faire « partout » des guérisons. Un risque ? Ne faire que passer. Ou passer un peu vite. Revenons à la lettre de mission. En donnant la méthode, elle prévient du danger par une précision utile sur laquelle on peut glisser vite : Si vous trouvez l'hospitalité dans une maison, restez-y . Belle exigence

A cause de la foule

Mardi, 25° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 8, 19-21) Si l'on se laisse aller au sentimentalisme familial, cette parole du Christ qui rabroue sa mère et ses frères sans autre forme de procès semble sévère. Elle n'en demeure pas moins purificatrice. Une certaine pastorale chrétienne a en effet tendance à sacraliser la famille, à en faire une fin en soi, un gage de réussite ou de bénédiction incontournable, conformément d'ailleurs aux valeurs culturelles du monde ancien. Jésus déplace sensiblement les choses. Certes, le christianisme bénit la famille, mais en l'ordonnant en profondeur au service. Mystérieusement, il ne lui réserve pas les premières places. Revenons à la scène et observons attentivement la justesse du placement des uns et des autres, à forte valeur spirituelle. Ainsi, sa mère et ses frères ne pouvaient arriver jusqu'à lui « à cause de la foule » . Cette mère incomparable et ses frères du...

La manière dont vous écoutez

Lundi, 25° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 8, 16-18) Entre deux paraboles et trois préceptes avisés, une recommandation de Jésus ce matin, comme en incise, qui pourrait bien passer inaperçue, et ne faire que passer : faites attention à la manière dont vous écoutez. Juste un petit conseil de bon aloi ? Une petite indication relevant de la fonction phatique du langage, comme disent les linguistes, équivalent à un votre attention s'il vous plaît ? En vérité, l'air de rien, le commandement des commandements ! Bien sûr qu'il faut aimer Dieu de tout son cœur et son prochain comme soi-même. Mais tout autant, il s'agit surtout de veiller sur nos oreilles ! Nos oreilles ! L'organe essentiel, et le diable, qui les déteste ouvertes, se plait à bien les boucher. C'est fou le nombre de trucs et de machins qu'on se fourre dans les oreilles, pour en obstruer la belle

Le semeur sortit pour semer la semence

Samedi, 24° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 8, 4-15) La parabole du semeur est plus qu'une parabole, c'est une leçon d'herméneutique. Avec une sollicitude infatigable, Jésus met les mots de Dieu à hauteur d'homme. Ici apparemment, plus de mystère. Interprétation close : la semence, c'est la parole de Dieu. Le bord du chemin est bien identifié. Pierres et ronces sont démasqués, jusqu'à cette bonne terre, qui livre son secret et montre ici son beau visage. Commentateurs circulez ! L'explication de texte est donc terminée ? Du terrain et de ses différents états, Jésus a dit l'essentiel. Il s'attarde assez peu sur celui qui traverse obliquement la scène, comme une ombre. Il désigne pourtant clairement le démon, déguisé en oiseau et qui, l'air de rien, s'obstine à dé-semer, à arracher la Parole de Dieu des terres superficielles. Il reste surtout très discret sur le protagonist...

Ainsi que des femmes

Vendredi, 24° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 8, 1-3) Qui se souvient de Jeanne, femme de Kouza, l'intendant d'Hérode ? Prête-t-on jamais assez d'attention au cortège divin, à son exacte composition ? Elle est assez émouvante, cette notation discrète du début de chapitre 8 de Luc. On y voit Jésus passer de village en village, accompagné bien sûr des douze. La brièveté de l'Évangile du jour permet toutefois un arrêt sur image très utile pour contempler l'importance d'un sillage essentiel dans les déplacements de Jésus, pour mesurer la présence des saintes femmes et l'importance qu'elles ont dans sa suite. Les femmes ! A l'époque évidemment, ce n'était pas bien leur place… Trois d'ailleurs, comme pour honorer leur assistance décisive à la mission, garderont à jamais un nom, presque un visage :

Savons-nous l’adorer ?

Jeudi, 24° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 7, 36-50) Et si nous étions un peu comme Simon ? Le Christ s'est fait si proche des hommes que beaucoup humainement l'estiment. On peut l'inviter facilement à sa table, de façon presque mondaine, histoire de discuter avec lui, mais sans rien engager de nos vies. C'est à coup sûr quelqu'un d'intéressant. Savons-nous l'adorer ? Savons-nous encore nous prosterner devant lui, nous mettre à genoux ? Rien n'est plus contraire à l'esprit moderne. N'est-ce pas ce qui, dans l'islam, fascina Charles de Foucauld et quelques grandes âmes en quête de Dieu. Nos eucharisties, et c'est bien, sont des lieux de rassemblement. Sont-elles encore des lieux d'adoration ? Reconnaissons-le, nous perdons parfois le sens du sacré. Voyons-nous assez la

Gamins assis sur la place

Mercredi, 24° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 7, 31-35) Pourquoi donc aller chercher cette histoire de gamins assis sur des places qui en interpellent d'autres , pour nous réveiller de nos inattentions ? Pour nous arracher au « cause toujours ! », désensabler en nous la disponibilité à bien entendre et à bien comprendre, quelle curieuse comparaison ! Et à qui ressemble cette génération , celle du temps de Jésus, mais aussi la nôtre, puisque la richesse du démonstratif permet de jouer de la double référence ? Plutôt à ces sales gamins, les autres, ceux qui sont interpelés parce qu'ils n'en font jamais qu'à leur tête, bornés et définitivement à côté de la plaque ? Ou, sur la même place, assis à leurs côtés, à ces vivants enfants qui passent leur temps à jouer de la flûte et chanter des lamentations ? A chaque époque, ce coin où jouent les enfants, la place du village se diviserait donc en deux ? A moins que ce ne s...

C’était un fils unique

Mardi, 24° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 7, 11-17) C'était un fils unique, et sa mère était veuve . C'est assez pour dire l'intensité du drame. L'évangéliste, feignant de donner juste l'information, prend là la terrible mesure du malheur humain et de la façon injuste, incompréhensible, avec laquelle il frappe certaines existences. Il est des pensées religieuses où la souffrance est à proportion du péché, comme justifiée, et il faut expier. Pas avec Jésus. Devant tant d'infortunes humaines, il craque. Qui est ce Dieu incroyable qui, par amour, craque devant nos grandes misères. Il sait bien qu'un jour, évidemment, tout cela sera transfiguré. Mais à ce jour… Alors, il y va ! Il ne diffère pas. En vérité, en ressuscitant ce tout jeune homme, il commence à

Seulement une parole !

Lundi, 24° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 7, 1-10) Le centurion romain ! Un des plus beaux visages de l'évangile. Une rencontre inoubliable, qui a beaucoup touché Jésus lui-même. En lui, le constant rappel que la sainteté est en partage dans toute l'humanité, et ne se confine pas aux bornes des apparences, ou des seules obédiences : même en Israël, je n'ai pas trouvé une telle foi . Le mystère de l'Église, de même, la fait secrètement et heureusement déborder des frontières de ce qu'on en voit. A cet homme magnifique et sans doute si essentiel, la liturgie eucharistique a emprunté les mots merveilleux de sa supplique au Christ pour les mettre à chaque messe dans notre bouche : dis seulement une parole et je serai guéri . Dis seulement une parole… Bien sûr, dans le sens premier : un seul mot de toi suffit. Une façon de reconnaître à Jésus son autorité. Un chef n'a qu'à parler, et sa parole se...

Écologie évangélique

Samedi, 23° semaine du Temps Ordinaire Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 6, 43-49) À bien écouter Jésus, on voit l'avantage qu'il y a à observer attentivement la nature, son fonctionnement, implacable parfois. De quoi le Christ fait-il souvent la matière de son enseignement, sinon de ce que nous enseignent les arbres, de ce que nous disent les figues, les ronces, les vendanges, le raisin ou les épines, ou encore les torrents, qui dévastent les maisons mal établies. La sagesse de l'évangile prend souvent corps de la sagesse humaine, en nous invitant à mettre spirituellement à profit les lois du monde. Apparemment simple ! Encore nous faut-il consentir à ce que les choses soient ce qu'elles sont, selon un principe de réalité, qui parfois contrarie notre principe de plaisir. Avec toutes ces images, Jésus veut aussi nous